
Kim Jiyoung ? Vos papiers svp 🥸
• Titre original : 82년생 김지영
• Autrice : Cho Nam-joo
• Genre : roman féministe
• Parution : 2016 (Corée du Sud)
• Version française : Nil, 2020 / 10/18, 2021
• Traducteurs : Kyungran Choi, Pierre Bisiou
• Nombre de pages : 168
• Adaptation en film en 2019
Qui aurait cru, en attrapant ce tout petit roman de même pas 200 pages, que j’allais ouvrir la boite de Pandore des inégalités sexistes et des agressions sexuelles en Corée du Sud ? Eh bien pas moi !
Pourtant, 3h et 29 onglets ouverts (estimation basse) plus tard, il faut bien le reconnaître : Kim Jiyoung, née en 1982, sorti en 2016 en Corée, et en 2020 pour la version française, m’a poussée à explorer les méandres des scandales sud-coréens, pour tenter de comprendre l’impact que ce petit livre a eu dans la société sud-coréenne. Vous allez donc trouver, un peu en vrac : un résumé du livre, des parenthèses, des anecdotes personnelles, et quelques infos sur des points abordés dans le livre.
C’est parti mon Kiki(m)
Ce roman nous parle de Kim Jiyoung, née en 1982 donc. Elle est construite, écrite, pour représenter la norme, la banalité. C’est une femme coréenne, qui se fond dans toutes les femmes coréennes. Son nom de famille est le plus répandu en Corée du Sud. Et toutes les étapes de sa vie servent à illustrer les discriminations dont les femmes sont victimes en Corée du Sud, afin, dit l’autrice, de « dresser un constat réaliste de ce que vivaient les femmes en 2015 en Corée du Sud ». Cho Nam-Joo est diplômée en sociologie, et cela se ressent dans l’ouvrage, qui est largement émaillé de chiffres et de statistiques.
Automne 2015
L’histoire commence à l’automne 2015, et c’est d’ailleurs le titre du premier chapitre. Kim Jiyoung a 35 ans, est mariée depuis 3 ans, et a une petite fille d’un an. Ils vivent dans un appartement de la banlieue de Séoul, son mari travaille, elle est femme au foyer depuis la naissance de leur fille. Un 8 septembre, elle commence à parler comme si elle était une autre personne, comme si elle était sa propre mère. Son mari pense que c’est une plaisanterie en entendant sa femme l’appeler « mon gendre ». Mais plus tard, elle parle comme si elle était leur amie Cha Seungyeon, décédée depuis un an d’une complication lors de son accouchement. Et ces changements de personnalité ne se sont pas arrêtés. Son mari, désemparé, prend rendez-vous avec un psychiatre, pour expliquer la situation de sa femme. Le médecin préconise un soutien psychologique.
Et commence le récit de la vie de Kim Jiyoung
Dès l’enfance, les inégalités de traitement entre les hommes et les femmes sont intégrées. Kim Jiyoung et sa grande sœur partagent une chambre, elles sont servies en dernier à table, et héritent des moins bons morceaux de viande. Le petit frère, quant à lui, a sa propre chambre, est servi avant les filles, et a des fournitures scolaires neuves. « [Kim Jiyoung] n’en concevait aucune jalousie. Telle avait toujours été la règle. »
En primaire, tout va bien pour Kim Jiyoung, elle est bonne élève, mais subit les « blagues » de son voisin de classe, qui lui cache ses affaires, ou la tape. Lorsqu’elle se plaint à la maîtresse, celle-ci l’écoute mais lui répond : « Les garçons sont comme ça. Ils font exprès d’être méchants avec les filles qu’ils aiment ».
(J’ouvre une parenthèse…
Est-ce que ce n’est pas désespérant, ça aussi ? Pour être honnête, ce passage m’a beaucoup touchée (oui, moi, scolarisée dans une école primaire d’Indre-et-Loire), parce qu’il m’est arrivée exactement la même situation avec un garçon en primaire. Mon voisin de table, mon « amoureux » comme avaient décrété nos camarades de classe, me tapait en rigolant dès que je prenais quelque chose dans mon cartable, ou dans le tiroir sous la table. Jusqu’à ce qu’un jour, n’en pouvant plus, je le repousse brutalement. Je l’ai poussé tellement fort qu’il s’est mangé le mur (il était assis à côté du mur, je ne lui ai pas fait traverser la classe quand même). Sauf que contrairement à moi, qui n’avait jamais rien dit, il s’est plaint. Sa mère est venue reprocher à la mienne ma violence. J’ai tout raconté à ma mère, et elle m’a donnée raison devant la mère du garçon. Je n’avais pas à me faire taper par son fils à longueur de journée, et j’avais réagi pour me défendre. Si lui était violent avec moi, il fallait qu’il s’attende à ce qu’on le soit avec lui. Je ne vous raconte pas la sensation de victoire !! Merci encore mille fois maman ! Je me sentais tellement mal d’avoir fait mal, mais grâce à ces quelques mots, j’ai compris que, bien qu’assez maladroitement, j’avais répondu, je m’étais défendue. Bon, j’ai quand même été sermonnée ensuite sur l’utilisation de la violence, et j’en ai retenu qu’il fallait mieux parler d’une situation problématique avant qu’elle n’empire. Mais enfin, ce garçon ne m’a plus jamais tapée après ça. Et aucun autre d’ailleurs.
Quittons cette charmante région d’Indre-et-Loire, et revenons en Corée du Sud.
…et je la referme)
Viendront ensuite le lycée, l’adolescence, les allusions sexuelles, et les insultes. Certains professeurs hommes se permettent de soulever les jupes pour « contrôler les uniformes », dans les transports en commun, des hommes se collent aux cuisses ou au dos des jeunes filles, et point culminant : Kim Jiyoung se fait traiter de salope par un camarade d’étude qui la suit et cherche à la draguer, alors qu’elle ne répond pas favorablement à sa « proposition ». C’est vrai, elle lui avait souri en lui faisant passer des photocopies, ce qui était, du point de vue du garçon, une invitation franche à un rapprochement. Choquée, à partir de ce moment, Kim Jiyoung a peur. Peur de sa manière de s’habiller, de l’heure à laquelle elle prend le bus, de sa manière de sourire, et des hommes.
Le seul point positif dans tout ça, c’est l’entraide féminine. Lorsqu’elle se fait insulter par le garçon aux photocopies, une femme inconnue la sort de cette situation en faisant fuir le garçon. Elle lui dira également ces mots : « Ce n’est pas votre faute » (mots ô combien importants).
C’est d’ailleurs incroyable comme ces quelques mots peuvent être réconfortants et essentiels. Je ne pense surprendre personne en disant que c’est relativement monnaie courante que de se faire insulter par des inconnus, dans la rue ou ailleurs, pour des raisons plus ou moins étayées. Se faire traiter de salope sans raison, en entrant à peine dans l’adolescence, est assez choquant, jusqu’à ce que l’on comprenne qu’il vaudrait mieux s’y habituer, puisque cela se reproduira. Mais ça, on l’apprend avec le temps. (Oui, c’était effectivement une parenthèse. Je la referme, je la referme).
A la fac, Kim Jiyoung a un petit ami. Mais voilà, ils rompent, des garçons en discutent, pensant ne pas être entendus. L’un d’eux a l’air d’apprécier Kim Jiyoung, mais conclut par : « Je ramasse pas les chewing-gums des autres pour les mâcher ». Kim Jiyoung a surpris la conversation. Et le gars qui parle, elle le connaît. C’est un type sympa, respectueux, dont elle a une bonne opinion. Il est exemplaire. Comme quoi.
Elle termine ses études. A cette période, la Corée du Sud traverse une grave crise financière, et l’économie est au plus bas (on en parle d’ailleurs dans l’article « K-pop, soft power et culture globale »). Difficile donc, de trouver un travail. Là encore, les discriminations refont leur apparition, et un sondage établit qu’en 2005, année où Kim Jiyoung termine ses études, le taux de femmes embauchées est de 29,6% (sondage accompagné d’un commentaire disant qu’un fort vent féminin souffle sur le marché de l’emploi…).

Les entretiens se succèdent, sans succès. Elle réussit finalement à se faire embaucher dans une entreprise d’événementiel. Ce n’est pas ce qu’elle voulait faire à la base, mais elle s’épanouit dans ce travail où elle trouve sa place. Ce qui n’empêche pas qu’au détour d’une conversation avec un de ses collègues, elle découvre les inégalités dont les femmes sont victimes : dès le premier mois de travail, les salariés hommes ont un salaire plus important que les salariées femmes (d’après l’OCDE, la Corée du Sud est le pays où l’écart entre les salaires est le plus important), et les femmes, susceptibles d’avoir des enfants, sont considérées comme peu fiables sur le long terme, et sont donc écartées de postes à haute implication.
Kim Jiyoung se marie, mais rapidement les familles respectives des mariés commencent à s’impatienter : quand arrivera la bonne nouvelle ? Kim Jiyoung n’est pas franchement emballée par l’idée d’avoir un bébé, mais cela semble être la suite logique, et son mari est partant. Elle tombe enceinte. Elle sera obligée de quitter son travail après avoir accouché, le couple n’ayant pas les moyens de payer une nounou. Le moral de Kim Jiyoung est franchement bas. Ah oui, et en plus c’est une fille.
Une fois le bébé né, elle est femme au foyer à plein temps, et épuisée, à plein temps aussi. Une ancienne collègue venue lui rendre visite lui donne des nouvelles du bureau : une caméra a été trouvée dans les toilettes des femmes, et les vidéos ont circulé sur internet. Un manager de l’entreprise a vu une des vidéos, et l’a envoyée à ses collègues. De fil en aiguille, cela s’est su, les femmes de l’entreprise sont allées inspecter les toilettes et ont amené la caméra à la police. Autant dire que l’ambiance est explosive dans la boite, les salariées sont sous le choc, et le patron tente d’étouffer l’affaire.

La goutte d’eau qui fera déborder le vase tombera une après-midi d’automne, alors que Kim Jiyoung revient de la garderie où elle a récupéré sa fille. Sur le chemin, elle se prend un café, mais surtout des commentaires de salariés en pause, qui la qualifient de « mère-parasite » ayant la belle vie en buvant un café avec l’argent gagné par le dur labeur de son mari. Alors qu’en elle, le regret de sa vie active l’étreint encore plus fort, que la fatigue et les soucis s’accumulent, que les perspectives d’avenir semblent si éloignées de ce dont elle avait rêvé, elle implose.
Le dernier chapitre est narré par le psychiatre qui suit Kim Jiyoung, première voix d’homme du livre. Il commente l’état de la jeune femme, et fait un parallèle avec sa vie, ou la vie de sa femme plutôt, qui s’avère finalement ne pas être si éloignée de celle de Kim Jiyoung. Le livre ne s’achève pas vraiment sur une note positive, et laisse une impression douce-amère.
Voilà pour l’histoire de Kim Jiyoung, née en 1982. Maintenant, j’aimerais bien revenir sur deux, trois choses.
La sélection des foetus
La mère de Kim Jiyoung, bien que soutenant ses filles sans condition, est elle-même tributaire des inégalités de son temps : enceinte d’une fille, puis d’une deuxième, elle s’est excusée à chaque fois auprès de sa belle-mère de ne pas avoir de garçon. Elle ira même avorter de son troisième enfant, qui était encore une fille. « Ce n’était pas son choix, mais c’était sa responsabilité ». Jusqu’à ce qu’enfin, un bébé garçon naisse.
Je ne savais pas qu’il y avait eu une pratique de sélection des foetus en Corée du Sud. Je suis donc allée me renseigner.
L’avortement en Corée du Sud a été partiellement dépénalisé en 1973, et complètement en 2021. Le premier programme national de planification familiale a été mis en place en 1962, et visait à contrôler le taux de fécondité qui était alors très élevé. Dans les années 1980, il comprenait, entre autres, l’accès gratuit aux méthodes de contraception, l’éducation sexuelle, ainsi que des subventions, allocations et aides pour les adultes souhaitant se faire stériliser. En 1983, le gouvernement supprime les aides financières pour les parents ayant 2 enfants ou plus et encourage la population à n’avoir qu’un seul enfant à l’aide de campagnes publicitaires.(sources) Le slogan du planning familial en 1984 est d’ailleurs : « même deux, c’est trop ».(sources)

Dans les années 1980, avec le développement des techniques d’échographie, un nombre croissant de personnes a recours à l’avortement des fœtus féminins, dans le but d’avoir un fils. Ce phénomène n’est pas propre à la Corée : il est observé dans plusieurs pays d’Asie. En 1987, le nouveau gouvernement démocratique sud-coréen prend des mesures : une loi interdit aux médecins de révéler le sexe des fœtus aux femmes enceintes. La forte surreprésentation des enfants masculins à la naissance continue néanmoins d’augmenter jusqu’au milieu des années 1990, avant de diminuer à la fin des années 2000. La loi sera finalement abrogée en 2008, jugée contraire aux droits des femmes et à la liberté des médecins. La sélection du sexe du fœtus a quasiment disparu aujourd’hui en Corée, et l’écart tend donc à se combler : en 1993, il y avait 209,7 garçons pour 100 filles, et en 2022, 104,7 pour 100. (sources, sources)
Héritage du Confucianisme
Je ne suis pas experte, donc je ne vais pas me lancer dans un historique du confucianisme. En revanche, j’ai tout de même lu que la société coréenne étant largement basée sur le confucianisme, des traditions héritées de cette philosophie régissent encore les rapports.
Le confucianisme s’appuie sur trois types de relations sociales fondamentales : la relation père-fils, la relation gouvernant-ministre, et la relation époux-épouse. Les pères, gouvernants et maris occupent donc des positions plus élevées que les femmes. Bien que des lois aient été adoptées pour faire évoluer la position des femmes, comme la loi de 1987 sur l’égalité des chances, ou la création en 2001 du ministère de l’Egalité des genres et de la Famille, les inégalités persistent. Aujourd’hui, les femmes touchent 38 % de moins que les hommes pour un travail égal, et une employée sur six démissionne après s’être mariée ou avoir eu un enfant.
Lors de la campagne pour la présidentielle de 2022, Yoon Suk-yeol, l’actuel président (en prison ceci dit), avait notamment promis la suppression du ministère à l’Égalité femmes-hommes, estimant que le féminisme est la raison pour laquelle il ne naît pas assez d’enfants (la Corée du Sud possédait en 2023 le taux de natalité le plus bas au monde). Il avait également annoncé d’importantes coupes dans le budget alloué en 2024 à la prévention des violences faites aux femmes et au soutien aux victimes, engendrant de vives critiques d’organisations de défense des droits des femmes. (sources : Amnesty International)
« Molka », des caméra-espionnes qui ne vous veulent pas du bien
Je ne connaissais pas ce phénomène, et heureusement d’ailleurs. Mais comme il est abordé dans le livre par le récit de l’ancienne collègue du Kim Jiyoung, je me suis renseignée. Et ça fait froid dans le dos.
Molka est l’abréviation de « mollae-kamera », qui signifie littéralement « caméra sournoise ». Il s’agit de mini-caméras espions (les plus petites font la taille d’un bouton de chemise), posées par des gens très mal intentionnés pour capturer des images à l’insu des personnes filmées. Elles peuvent être placées dans des endroits très divers, dans des toilettes publiques, des chambres d’hôtel, des cabines d’essayage, ou encore des vestiaires de gymnase ou de piscine. Les vidéos sont ensuite revendues, ou diffusées sur internet. « Molka » désigne à la fois la caméra et les vidéos. Les conséquences psychologiques pour les victimes sont lourdes : d’après une étude du Korea Women’s Development Institute de 2019, 45,6% des femmes victimes de molka ont déjà eu des pensées suicidaires. (sources : Libération )
Selon les statistiques de la police, dix-sept cas de « molka » ont été dénombrés quotidiennement en 2017. Environ 98 % des coupables sont des hommes de différents milieux. Plus de 80 % des victimes sont des femmes. (sources : Le Monde) Le 7 juillet 2018, plus de 60 000 femmes manifestent pour protester contre le « molka », et contre le peu de sanctions prises à l’égard des coupables. Leur slogan : «Ma vie n’est pas ton film porno.» Le président de l’époque, Moon Jae-in, a lui-même concédé que le phénomène faisait désormais «partie de la vie quotidienne» sud-coréenne, et a appelé, suite à la mobilisation, à des sanctions plus fortes pour les coupables – les peines prévues par la loi n’étant presque jamais appliquées. (sources : Libération).

En mars 2019, deux hommes ont été arrêtés pour avoir diffusé en direct sur internet et vendu des vidéos enregistrées dans des chambres d’hôtel, exposant plus de 1600 personnes à leur insu. (sources : Le Monde)
Le milieu de la K-pop n’a pas été épargné non plus par les scandales de vidéos prises sans consentement, et l’affaire du « Burning Sun », du nom d’un club de Gangnam aujourd’hui fermé, en est la terrible illustration.
Ce club dont Seungri, star du groupe très populaire BigBand, était l’un des directeurs, abritait des activités illégales : vente de drogue, prostituées mineures, usage de GHB sur des clientes… le tout couvert grâce à une corruption de la police plutôt efficace (le roman « Made In Gangnam », est, finalement, peut-être plus proche de la réalité que je ne le pensais, lire aussi cette enquête de la BBC faisant mention de clients VIP demandant des « zombies », à savoir des femmes inconscientes pour satisfaire leurs envies sexuelles).

Je vous passe les détails, si le sujet vous intéresse un long article sur Wikipédia y est consacré. Mais l’enquête sur le Burning Man a révélé que le chanteur Seungri lui-même, ainsi que d’autres grands noms de la K-pop, s’échangeaient ainsi des vidéos et photos de femmes prises à leur insu via des caméras cachées, lors de relations consenties ou lors de viols. Ils ont été condamnées depuis.
Aujourd’hui, les scandales (et les manifestations) continuent, le deepfake ayant fait son entrée massive dans les contenus diffusés illégalement…
Et après ?
Il y aurait encore tellement de choses à dire…

Que le roman a été adapté au cinéma, que le film a eu beaucoup de succès, mais que l’actrice principale, Jung Yu-mi, a reçu des milliers de commentaires haineux sur son Instagram en une journée lors de l’annonce de la distribution. Qu’une chanteuse de K-pop, ayant partagé sur internet avoir lu « Kim Jiyoung, née en 1982 », s’est retrouvée victime de cyber-harcèlement, qu’une vague anti-féministe s’est faite entendre de manière assez virulente sur les réseaux, que le maire de Séoul a promis qu’il n’y aurait « plus de chagrin pour Kim Jiyoung » en votant un nouveau budget pour les soins aux enfants, preuve de l’impact et de la pertinence de ce livre…
Mais je vais m’arrêter là, c’est déjà long, et franchement, tout ça m’a un peu déprimée.
Je me rends compte que ce roman me plonge pas mal dans l’introspection. Même s’il énonce des banalités d’une certaine manière, parce qu’on a tristement l’habitude de ces situations, de ces chiffres, de ces faits divers, m’y plonger pour parler du livre me fait repasser par certains épisodes de ma propre vie, et il est difficile de ne pas voir certaines correspondances entre la vie de Kim Jiyoung, et la mienne, preuve finalement que le discours tenu dans le roman est à même de toucher différentes nations. D’ailleurs, le roman a été traduit dans au moins 18 langues, avec un succès immédiat dans le monde entier.
A mi-chemin entre le roman et l’essai, l’ouvrage nous permet de naviguer dans cette société coréenne, qui semble, à la lecture, pétrie d’inégalités. Pour être honnête, c’est un peu rageant. Un peu désespérant. Non. En fait, c’est très rageant, et très désespérant. Chaque étape de la vie de Kim Jiyoung est freinée ou orientée par le fait qu’elle soit une femme. Et les situations auxquelles elle se retrouve confrontée permettent de faire un large balayage des problèmes « classiques » que les femmes peuvent rencontrer. Des plus « évidents » (discrimination à l’embauche, écart de salaire), aux plus insidieux (avortement des fœtus filles, place privilégiée des garçons au sein des familles, harcèlement sexuel…).
J’avoue avoir refermé ce livre en étant triste et en colère. Heureusement que les personnages féminins qui entourent Kim Jiyoung sont porteurs d’espoirs et d’alternatives, cela nous rappelle que les liens, amicaux et familiaux, sont précieux, et permettent aussi de traverser certaines situations difficiles.


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